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Le Journal du Palais : Agrodoubs lance un lait local et vertueux

Découvrez une copie de l’article du Journal le Palais publié le 15 Mars 2022 par Frédéric Chevalier. Source de l’article : cliquez ici pour consulter l’original.

La société Agrodoubs, basée à Flagey dans le Doubs innove en commercialisant un lait UHT de qualité qui rémunère bien les producteurs. En s’associant avec le fromager haut-saônois Milleret, il donne naissance à une filière lait locale en circuit court et au cahier des charges proche de celui de l’AOP Comté.

Le goût de l’innovation et un sens certain du rebond et de l’adaptation font partie de l’ADN de Georges Bourgon, président d’Agrodoubs et de sa famille. Tout a commencé dans les années 1970. À Flagey, dans le village natal du peintre Gustave Courbet, Albert et son épouse Marguerite Bourgon, lancent une entreprise locale de production et conditionnement d’œufs de poules : la société Coquy. « À l’époque de mes parents, un œuf mettait une semaine pour venir de Bretagne. Mon père a donc eu l’idée de produire un œuf régional en circuit court et qui plus est daté, sur la coquille, du jour de ponte. Cela n’avait jamais été fait avant ! Puis, pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, il va, dans les années 1990, dans l’activité de pasteurisation d’œufs, pour les valoriser auprès des professionnels des métiers de bouche (boulangeries, restaurants…) sous forme de coule d’œufs, blanc et jaune d’œufs en pasteurisation frais (conservation à 0,4°C) », raconte Georges Bourgon.

En 1992, celui-ci prend la relève de l’entreprise familiale qui distribue quelque 65 millions d’œufs à 300 hyper et supermarchés régionaux et diversifie encore la production, avec notamment la crème pâtissière qui deviendra le produit phare de cette société toujours en avance sur son temps. Elle fut, par exemple la première à arrêter l’élevage en cage, 20 ans avant ses concurrents. En 2001, Georges Bourgon lâche les rênes de Coquy et crée avec Arnaud Lavergne, spécialiste des questions d’hygiène, la société Agrodoubs, afin de tirer le meilleur parti de la diversification amorcée chez Coquy. L’année suivante, l’activité des préparations pour desserts est lancée : « nous avons du lait, des œufs et le savoir-faire nécessaire pour travailler des produits sensibles d’un point de vue bactériologique  », explique Arnaud Lavergne. C’est donc à partir des matières premières de la Franche-Comté que la première préparation pour crème brûlée Agrodoubs est développée.

Par la suite, ils élaborent ensemble une stratégie d’offre, avec un service R&D en interne pour pouvoir créer des recettes sur-mesure et collaborent avec un réseau de chefs pour réaliser des recettes simples et proches du « fait-maison  ». Les gammes de produits se multiplient et connaissent un véritable succès auprès des professionnels des métiers de bouche et même chez les particuliers puisque l’entreprise imagine une gamme de dessert au format brique un litre (panna cotta, crème brulée…). Face à cet accroissement d’activité, Agrodoubs a procédé, en 2017, à des travaux d’agrandissement pour doubler sa surface de production. Aujourd’hui, Agrodoubs s’étend sur 3.300 mètres carrés de bâtiments, produit 25.000 tonnes de marchandise, réalise un chiffre d’affaires de près de six millions d’euros (90 % du CA en direction des métiers de bouche), compte 18 collaborateurs et se développe à l’export (25 % du CA), vers l’Europe, les États-Unis et l’Asie.

UN VRAI PARTENARIAT COOPÉRATIF

Quant à l’histoire du lait de pays franc-comtois, elle commence par le constat d’un paradoxe. « Un jour, durant la période Covid, un de nos clients m’interpelle : “Georges, je connais des agriculteurs qui produisent du lait et qui sont obligés d’en jeter. Ils ne peuvent vivre de leur métier, ce n’est pas normal”. En magasins, les distributeurs doivent s’approvisionner auprès d’autres régions, voire d’autres pays. C’était pour moi, impossible à admettre, surtout chez nous, où le lait est symbole de l’identité régionale, avec la filière Comté. Il fallait donc agir  », se souvient Georges Bourgon. Soutenue par la région, la Chambre d’Agriculture, Vitagora et les distributeurs locaux, l’entrepreneur décide de relever le défi d’un lait local et en circuit court.

« Nous avons soutenu la démarche d’Agrodoubs, innovante et vertueuse, et promu cet élan vers du local à condition qu’il rémunère bien le producteur »

Pour cela, il s’équipe d’une ligne UHT : « la seule dans un rayon de 300 kilomètres. À elle seule, cette unité représente un investissement de 1,8 million d’euros. À cela s’est ajouté un agrandissement de nos locaux pour les porter à 3.300 mètres, un changement du groupe froid, la construction d’une station d’épuration privée… Soit un montant total de quatre millions d’euros. Sans l’aide de la région, de 800.000 euros, dans la cadre du Plan d’accélération de l’investissement régional (PAIR) nous n’aurions rien pu faire. C’est également le résultat de l’engagement de toute une filière, de l’amont, avec des éleveurs partenaires, à l’aval, avec des distributeurs qui ont joué le jeu, les élus de la communauté de communes Loue-Lison… C’est une victoire collective, c’est aujourd’hui toute la Franche-Comté qui gagne ! », s’enthousiasme Georges Bourgon.

« Au-delà de l’apport financier, notre travail fut également de faciliter la mise en réseau pour que l’idée devienne mature. À la base, une question : comment, dans une région agricole comme la nôtre, aider les agriculteurs qui ne peuvent pas vivre de leurs revenus ? Nous avons soutenu la démarche d’Agrodoubs, innovante et vertueuse, et promu cet élan vers du local à condition qu’il rémunère bien le producteur », précise Marie-Guite Dufay, présidente de la région.

SOUTIEN DES EMPLOIS LOCAUX ET JUSTE RÉMUNÉRATION

Un deal qui convient parfaitement au dirigeants d’Agrodoubs qui va s’associer à un autre défenseur de la cause agricole : Denis Milleret, à la tête de la célèbre fromagerie haute-saônoise éponyme, créatrice du Charcennay, de l’Ortolan et autre Roucoulons. Basée depuis 1921 dans le village de Charcenne, l’entreprise familiale a mis en place pour sa collecte de lait la charte « Grand Pâturage ».

« Cette dernière a été établie avec les éleveurs pour garantir un lait responsable et de qualité. Notre lait est local, issu d’exploitations situées à 30 kilomètres autour de Charcenne. Les vaches sont nourries avec des fourrages quasi-exclusivement issus des terres des exploitations. On estime l’autonomie fourragère proche de 100 %. Les vaches sont élevées au moins six mois par an en pâturage. La surface pâturable est au minimum de 25 ares accessibles par vache. Les producteurs s’engagent sur la traçabilité, la santé et le bien-être de leur troupeau, tout en participant à la protection de l’environnement. Les exploitations sont à taille humaine avec un maximum de 50 vaches par unité de main d’œuvre. La charte inclue également une dimension équitable, l’objectif étant d’impliquer les producteurs dans la fixation d’un prix du lait rémunérateur en tenant compte de leur coûts de production. Notre entreprise s’est engagée à rémunérer les éleveurs 42,8 centimes le litre de lait pour la période du 1er mars au 30 juin 2022. Cette rémunération est revue deux fois par an avec les acteurs de la filière. Côté consommateur : celui-ci peut compter sur un produit de qualité à un prix abordable autour d’un euro, aligné sur celui de la marque “C’est qui le patron ?”. Enfin, nos briques sont recyclables et conditionnées à l’aide de film recyclé et recyclable », développe Georges Bourgon.

Ce lait, produit à 28.000 litres par semaine, et qui devrait prochainement être labellisé d’une marque régionale en cours de création, est déjà présent dans une centaine de supermarchés locaux.

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